Matthieu 10, 37-42: Se Renoncer pour Suivre Jésus

La vision de Saint Hubert qui le conduisit à la conversion - Sculpture de l'église des Tourailles (Orne)

                                 13^e Dimanche Temps Ordinaire – Année A

1. 2 Rois 4, 8-16 : Celui qui s'arrête toujours chez nous est un saint homme de Dieu.

2. Psaume 88 : Sans fin Seigneur nous chanterons ton amour !

3. Romains 6, 3-11 : Par le baptême, menons une vie nouvelle.

4. Matthieu 10, 37-42 : Qui vous accueille m'accueille.

Le Royaume de Dieu Menacé par une Partie de Chasse!   

 Dans l'évangile de Matthieu, le contexte dans lequel apparaît un récit, (ce qui le précède et ce qui le suit immédiatement), est souvent une clé d'interprétation utile, intéressante et prometteuse. Les versets si sévères, si rudes et si rigides que nous venons de lire sont à comprendre dans un contexte d'hostilité, d'adversité qui est fait contre le message de l'évangile. Rappelons-nous ce qui était lu et médité dimanche dernier : « Craignez celui qui peut perdre dans la géhenne à la fois l'âme et le corps » ! ou bien encore : « Celui qui m'aura renié devant les hommes, moi aussi je le renierai devant mon Père qui est au cieux ! ». (Et entre le passage que nous avons lu dimanche dernier, et celui que nous lisons aujourd'hui, il en est un autre, si brutal, si violent et provocateur, que l'église dans sa sagesse n'a pas cru bon nous le proposer pour la messe !)

     L' Évangéliste Matthieu achève avec cet évangile que nous venons d'entendre, son deuxième discours, souvent qualifié de « discours missionnaire » dans nos bibles. Ce deuxième discours fait suite au premier, qui est celui de « l'annonce de la Bonne Nouvelle » ou de « la déclaration de l'approche du Royaume des Cieux ». Le premier discours de Jésus annonce, commente et explique le sublime idéal de la vie religieuse et spirituelle. (Rappelons-nous simplement, par exemple, le discours dit des « béatitudes » qui propose le bonheur!) Ce deuxième discours offre maintenant un contraste saisissant : les idéaux religieux et spirituels les plus élevés sont entravés par de basses réalités, par de mesquines motivations : les chrétiens sont persécutés.

     Au lieu d'être reconnus, accueillis, reçus, les apôtres font face à une terrible opposition. Les brebis sont envoyées au milieu des loups. La proclamation de la bonne nouvelle, les propositions au bonheur, l'annonce du Royaume des cieux tournent au vinaigre, par une minable partie de chasse. Les envoyés de la bonne nouvelle deviennent littéralement du gibier, la cible de persécutions. C'est le lancement des hostilités contre les envoyés de Jésus. Dans ce contexte, cet évangile nous explique deux choses :

     1. Par tous les moyens, l'écriture cherche à encourager à la persévérance. Demander aux apôtres d'aimer Jésus « plus que son père, sa mère, son fils ou sa fille » (remarquez que l'époux et l'épouse ne sont pas mentionnés, et ce n'est pas par hasard), ou les préparer à « perdre leurs vies », cela revient à les armer, à équiper les envoyés contre les adversités. Afin de préserver le message intact, il est impératif de rester fidèle, jusqu'au bout, et de ne pas céder aux persécutions.

     D'un autre côté, l'écriture encourage également celles et ceux qui sont en mesure d'accueillir les envoyés et leur message : « qui vous accueille m'accueille ! » Que chacun prenne sa part, et que chacun reste fort dans l'adversité, sans céder aux pressions, aux intimidations qui peuvent être faites.

     2. Enfin, nous comprenons que les idéaux religieux et spirituels les plus sublimes, que l'avancée d'un royaume plus juste, que tout l'enseignement de Jésus dépend donc de notre capacité à tenir bon dans les situations adverses, si petites qu'elles puissent nous paraître. Il n'existe pas de gestes anodins. Notre évangile parle d'un verre d'eau offert, ce qui peut parfois suffire pour remplir l'âme, redonner espoir et confiance. Il n'existe pas de petit refus sans conséquences. Nos attitudes ont des effets, et comme en politique, le silence, le retrait ou la fuite restent autant d'assentiments tacites pour l'opinion commune, même mauvaise.

     Il nous est requis de prendre position et d'offrir ce généreux accueil sans lequel Dieu lui-même ne saurait établir parmi nous sa volonté et son Royaume.