Homélie du 1er Dimanche du Carême - Année B

Conquérir ou Construire ?

     Voilà un peu plus d'une semaine, j'essayai de communiquer à quelques jeunes de la paroisse la chose suivante. Considérons un téléphone portable, par exemple celui qui se trouve probablement dans notre poche en ce moment. Le modèle correspond à l'époque et à l'année de sa production. Nous reconnaissons et nous identifions facilement les anciens modèles par rapport aux plus récents. Nous comprenons facilement que les modèles de téléphone continuerons à se transformer, à évoluer, avec le développement de la science, de la technique et aussi de la mode. Nous n'imaginons pas de temps dans lequel il n'y aura plus d'évolution, de transformation des objets que nous utilisons.

     Au fur et à mesure du développement considérable de notre univers immédiat, de la transformation de la quantité et de la qualité des objets que nous utilisons sans cesse, nous en sommes souvent venus à nous représenter le progrès, presque exclusivement en termes de matérialité et d'externalité. Pour beaucoup d'entre nous, le progrès consiste dans le nombre et dans la valeur des objets que l'on peut acquérir ou conquérir, afin de nous rendre la vie plus facile, satisfaisante, heureuse ou confortable.

     La démarche du carême dans laquelle nous sommes entrés nous est souvent difficile à apprécier, parce qu'elle suppose que nous prenions de la distance et un regard critique face à cette vision des choses qui nous envahit pourtant. La démarche du carême qui nous est propre, à nous autres chrétiens, implique un renversement de nos perspectives : ce que nous appliquons habituellement aux objets de consommation courante, il est temps de l'appliquer aux personnes que nous sommes ! Chacun d'entre nous est capable de progrès, de transformation ou de perfection pour le meilleur, et ceci sans fin ! Dans le langage traditionnel de l'église, cela se nomme la conversion !

     En effet, il est temps que nous considérerions le progrès, non pas tant dans l'acquisition ou la conquête de quantité toujours plus grande d'objets (eux-mêmes sans cesse de meilleure qualité, et du pouvoir que ceux-ci représentent), mais dans la transformation des personnes que nous sommes, pour une plus grande capacité à faire le bien, en vue de la construction d'une société plus juste, plus belle, plus digne et plus aimable. Il ne s'agit pas tant de conquérir que de construire!

     Il me semble que l'évangile de ce jour, très bref, très concis, ne nous dit rien d'autre. Jésus vient d'être baptisé, et il est temps pour lui de passer à l'action, de faire carrière et d’œuvrer. Et cela commence par un test afin de mesurer sa force et sa volonté, sa motivation profonde. Servira-t-il la communauté ou se servira-t-il d'elle ? Consommera-t-il les richesses de ce monde afin d'alimenter sa propre richesse ou sa propre gloire, ou bien se consommera-t-il dans la rencontre et le salut de celles et ceux qu'il viendra à rencontrer ? Le combat qu'il mènera sera-t-il contre ce qui résiste à l'accroissement de sa puissance, richesse et gloire personnelles, ou bien sera-t-il une lutte contre ce qui, à l'intérieur aussi bien qu'à l'extérieur de sa personne, le détournerait de l'accomplissement de la justice, de la dignité et du bien commun ?

     Le combat de Jésus quelque part doit devenir le nôtre. Dans notre contemplation de ce que le Christ accomplit, nous pouvons puiser un exemple et une force. Le temps du carême est le moment de faire la vérité sur ce qui nous motive, sur la marche de nos vies et du monde. Allons-nous dans la bonne direction ? De quoi avons-nous besoin pour corriger tant soit peu la marche actuelle ?

     Le temps du carême est traditionnellement associé avec une ascèse, une discipline. Il s'agit de (re)devenir disciple du Christ. Ne négligeons pas les moyens que l'église nous offre. Il s'agit de nous convaincre du fait que le péché n'a pas d'avenir et, par conséquent, d'investir davantage nos énergies, notre temps et nos ressources vers ce qui peut construire. Divers outils sont à nos dispositions sur les plate-formes médiatiques ou au travers diverses revues. Ces outils nous encouragent à être inventifs. Voici en vrac quelques idées. L'important est de nous tourner avec détermination vers ce Christ, et vers l'amour qu'il nous propose.

     - Relire l'évangile du jour, considérer le message qu'il propose.

     - Noter les actions que je pourrais vivre et mener pendant le temps du carême : quel sera mon effort cette année ?

     - Visiter un malade, une personne isolée que je n'ai pas vue depuis longtemps. Demander des nouvelles par téléphone. Tenter d'instaurer une régularité.

     - Lire et méditer sur la vie d'un saint. L'église en a canonisé à peu près 50,000 jusqu'à présent : il y en a forcément un qui me ressemble ou avec lequel je puis me sentir proche !

     - Considérer la manière dont la nature m'émerveille.

     - Simplifier mon mode de vie, m'abstenir de quelque chose dans mon alimentation ou dans mes habitudes. Vivre cela dans la prière, le partage et dans un esprit d'offrande : comment vais-je manifester mon amour ?

     - Considérer la manière avec laquelle je place mes compétences et mes ressources au service de l'église, de la communauté ou d'associations.

     - Discerner les chemins de réconciliations auxquels je puis être appelé.

     - Etc.

     L'important, c'est que chacun trouve son chemin, sa manière d'être disciple ! Bon carême à tous !

1^er Dimanche de Carême – Année B

Dimanche de la Tentation

1. Genèse 9 : Alliance de Dieu avec Noé qui a échappé au déluge.

2. Psaume 24 : Tes chemins Seigneur, sont amour et vérité!

3. 1Pierre 3 : Le baptême vous sauve maintenant.

4. Marc 1, 12-15 : Jésus fut tenté par Satan et les anges le servaient.